Rashômon

Akira Kurosawa. 1950. Japon. 88 min. N&b. DCP. VOSTF.


Galaxie Kurosawa



Sous le vieux portique en ruine de Rashô, une passionnante réflexion sur la relativité de la réalité. Grâce à son Lion d’or décroché au Festival de Venise en 1951, le film qui permit de révéler toute une cinématographie jusqu’alors ignorée dans une Europe encore très fermée sur elle-même. Dans l’antique Kyoto, au Xe siècle, un crime est commis. Au procès, quatre témoins, quatre versions, quatre flash-back. Où se niche la vérité ? Précision d’orfèvre de la mise en scène, bouleversement de la structure narrative traditionnelle, subtil jeu d’ombres et de lumières pour un ahurissant voyage au centre de l’humain. Un chef-d’œuvre inaltérable. Rashômon se démarque par son cosmopolitisme. Un jeu Kabuki. Une intrigue pirandellienne. Et un récit emboîté qui n’est pas étranger au Citizen Kane de Welles. Le propos, quant à lui, est universel. L’homme, quand il prend la parole pour défendre son honneur, est confronté au mensonge. Ou plutôt, quand l’homme parle de lui, il ment pour se mettre en valeur, pour se conformer à ce qu’il se doit de paraître. Rashômon le onzième film d’Akira Kurosawa, une œuvre on ne peut plus importante pour son réalisateur et pour le cinéma tout court.
Un film difficile à monter car réalisé pendant la période d’occupation américaine au Japon, période durant laquelle la production cinématographique était très étroitement contrôlée par une lourde censure. Ainsi, l’évocation des samouraïs et de leurs combats était strictement interdite. Alors même si Rashômon n’était pas un film de sabre, il ne dut son salut qu’à un léger assouplissement du système. Une maigre ouverture dans laquelle s’engouffra immédiatement le cinéaste, non seulement pour révolutionner les codes du cinéma – ce fameux effet Rashômon consistant à décrire un même événement perçu de différents points de vue – mais aussi pour sonder l’âme humaine grâce à une mise en scène mobile et constamment inspirée, où les éléments joueraient un rôle primordial. Pour paraphraser le Maître, l’homme est-il capable d’être honnête avec lui-même ? Est-il capable de parler honnêtement de lui-même sans embellir le tableau ? Le constat est terrible, pessimiste même. Mais il n’empêche que Rashômon demeure un jouissif et remarquable jeu de piste au sein duquel le spectateur, et seul le spectateur, est convié à faire la part des choses.

dimanche 15 mars 2026, 17h00       Infos pratiques
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